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Produits Bio cultivés en serres chauffées : un paradoxe ?

Margot

07 juin 2024

Des tomates Bio et françaises... en plein mois de Janvier ? Non, non, vous ne rêvez pas, car oui, oui c'est bien réel. Si ces tomates précoces envahissent les étals, c’est en grande partie du fait des serres chauffées. Cependant, cette pratique soulève des questions importantes en ce qui concerne l'Agriculture Biologique. Explorons ensemble ce paradoxe.


Une serre, à quoi ça sert ? (promis, le jeu de mot était voulu)

Pour tout comprendre, commençons par le début : qu’est-ce qu’une serre ? Et quand on demande la définition à notre cher Larousse, voilà sur quoi nous tombons :

Capture d’écran 2024-06-05 à 16.55.49.png Source : Larousse, Éditions. Définition  : serre

Jusqu'ici, rien de bien compliqué : une serre, ça sert à développer des conditions idéales pour obtenir des plantes épanouies. Et d'un point de vue plus technique ? Sur le même principe que l’effet de serre, le rayonnement infrarouge du soleil va se retrouver piégé par les parois de l'infrastructure, ce qui va naturellement la réchauffer.

Pour les plus visuels d’entre vous, ça marche comme ça 👇

greenhouse

Source : Comment choisir sa serre de jardin ? - OOOGarden.fr


Ce fonctionnement-là, c'est celui d'une serre dite "froide" : une serre qui n’utilisera QUE la chaleur du soleil pour améliorer les conditions de culture et les protéger des agressions extérieures comme le vent, les parasites, la pluie, etc.

Bref, un avantage qui n’est pas négligeable, surtout en Bio, quand on sait que des cultures peuvent être fragiles ou que des régions sont particulièrement sujettes au vent (comme celles du sud).

Néanmoins, ces dernières peuvent également être chauffées afin de produire des cultures spécifiques toute l’année dans des pays froids ou tempérés (ex : les tomates et les concombres en France) et c’est là que ça commence à poser problème.

Des serres, en veux-tu, en voilà !


Parler de “serres chauffées”, ça peut vouloir tout et rien dire. Ces dernières se déclinent en plusieurs types, chacune avec ses propres caractéristiques et impacts environnementaux :
  • Les serres tempérées (température qui oscille entre 10° et 18°C et ne descend pas en dessous des 5°C) utilisent un chauffage minimal pour protéger les cultures contre les gelées nocturnes ou les froids extrêmes. Elles permettent de prolonger la saison de croissance, mais ne sont pas conçues pour des cultures intensives en plein hiver.
  • Les serres chauffées, quant à elles, sont équipées de systèmes de chauffage qui maintiennent des températures optimales (ne descend pas en dessous des 18°C) pour la croissance des cultures tout au long de l’année, indépendamment des conditions extérieures. Ce type de serre est couramment utilisé pour produire des légumes hors saison, comme les tomates en hiver, mais il nécessite une grande quantité d’énergie, souvent provenant de sources non renouvelables, ce qui soulève des questions de durabilité.
greenhouse Source : Pixabay

Le paradoxe

À première vue, produire des fruits et des légumes sous serres chauffées semble en contradiction avec les principes de l'Agriculture Biologique, qui prônent un respect de la terre et des cycles naturels. Pourtant, la réalité est plus complexe et la législation autour de l’Agriculture Biologique et des serres chauffées a évolué :

  • Avant 2019 : Le règlement Bio n’indiquait aucune restriction sur la production de légumes Bio sous serres chauffées.

  • 2019 : Les professionnels français, dont la FNAB (Fédération Nationale d'Agriculture Biologique), s’accordent pour encadrer cette pratique. La commercialisation de légumes produits sous serres chauffées est restreinte, justifiant ce cadrage par les grands principes de l’Agriculture Biologique : saisonnalité, économie, durabilité, sobriété. Les cultures Bio sous serres chauffées ne sont pas interdites, mais leurs produits ne doivent pas arriver sur les étals avant le 1ᵉʳ mai. Hm.... pas hyper clair, n'est-ce pas ?

  • Juin 2023 : Sous la pression des coopératives légumières partisanes d’une industrialisation de la Bio, le Conseil d’État décide d’annuler l’interdiction de vendre des légumes Bio cultivés sous serres chauffées avant le 1er mai afin de ne pas alimenter la concurrence face aux importations européennes. Le chauffage des serres en Bio et la vente des produits issus de ces cultures sans restriction redeviennent alors possibles.

En avril dernier, durant une visite dans le Gard chez nos producteurs, nous avions d’ailleurs demandé à Linda (Biogarden) son avis sur le sujet : “Je trouve ça très néfaste pour nos agriculteurs, car ils sont sur un créneau de précocité et sont en concurrence avec des professionnels qui chauffent, donc leurs produits ne sont pas valorisés. On arrive aussi sur un marché où les consommateurs ne savent plus très bien quelle est la saison, car il y a déjà du concombre depuis 3 mois sur les étals.

En résumé, un recul conséquent mettant en péril les exigences de base du cahier des charges de l’Agriculture Biologique et creusant davantage certaines inégalités.

Prenons l’exemple des tomates

greenhouse Source : Non aux légumes Bio produits à contre saison en serres chauffées ! - Réseaux GAB-FRAB

Une tomate française de saison a un bilan carbone inférieur à celui d'une tomate importée d’Espagne, même si cette dernière n'a pas été cultivée sous serre chauffée (plutôt logique, finalement). Toutefois, une tomate française hors saison, cultivée sous serre chauffée, a un bilan carbone nettement plus élevé.

Mais ce n’est pas tout, car suite à une étude du Centre Technique Interprofessionnel des Fruits et Légumes (CTIFL), il a été calculé qu’un kilo de tomates Bio ayant poussé sous serres chauffées « coûte l’équivalent d’un 1,05 litre de fioul. Soit 15 centilitres par tomate, un joli verre ».

Et si on s’attarde encore un peu plus sur les sources principales d’énergie de ces serres… Surprise : “l’énergie utilisée est principalement du gaz naturel sur 77 % des exploitations.” selon le CTIFL. Donc littéralement, une énergie fossile.

energie-serres-camembert2016.webp Source : CTIFL

Des chiffres qui démontrent d’autant plus le paradoxe entre une production Bio censée protéger l'environnement et le réel respect de ce dernier. Pas terrible, surtout quand on fait le choix d’acheter du Bio (qu’on paye souvent plus cher) pour respecter la planète, pas vrai ?

Pas de ça chez nous.

Vous vous êtes peut-être demandé pourquoi vous ne trouviez pas de tomates dans vos commandes plus tôt dans la saison ?

C'est simple : chez Bene Bono, malgré le fait que ce soit autorisé en Agriculture Biologique, nous avons fait le choix de ne pas nous fournir en produits issus de serres chauffées et les tomates de nos producteurs ont poussé à leur rythme avant d’être au top de leur forme pour se glisser dans vos commandes !

Un choix que nous voulons représentatif de notre engagement pour un avenir plus respectueux de notre planète <3

Sources

  • Fédération Nationale d'Horticulture. "Bio sous serres chauffées : le verdict est tombé." FNH
  • Agrobio Bretagne. "La saison des tomates bio, c’est de juin à octobre." Agrobio Bretagne
  • Ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation. "Agriculture biologique : le Conseil d’État enjoint de supprimer l’interdiction de commercialisation des produits sous serres chauffées entre le 21 décembre et le 30 avril." Ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation
  • Centre Technique Interprofessionnel des Fruits et Légumes (CTIFL). "Enquête sur le parc des serres chauffées en tomate et concombre en France." CTIFL

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